Notre série d’interview sur les #Doers se poursuit, découvrez ceux qui rendent possible l’innovation en Afrique. Cette fois-ci, c’est Léa Batal, Chief Operating Officer de Kajou qui nous raconte les projets et les réussites de son entreprise
Je suis Léa Batal et je suis dans le développement humanitaire depuis 7 ans. Je suis diplômée de sciences politiques et j’ai fait un master international. J’ai travaillé au Liban avec United Nations, puis un peu plus d’un an dans une agence française de développement de stratégie. Il s’agit de l’agence française de Développement où j’ai été co-coordinatrice de la réponse de l’AFD à la crise régionale syrienne et irakienne, j’ai été en appui au portfolio des projets Liban et Syrie mais aussi à l’élaboration du mécanisme de préqualification des ONG en contexte de crise, commençant par un pilote en Palestine. J’ai ensuite poursuivi mon aventure chez Kiron qui est une ONG au Liban pour aider les réfugiés à étudier, en pleine crise des religions. J’ai monté des projets et développer des stratégie opérationnelles et éducatives.
J’ai rejoint Kajou fin 2021, en tant que directrice des opérations, des productions et contenus. Je m’occupe également de l’engagement et du développement du business en dehors du Sénégal. Kajou, c’est une entreprise sociale née d’un constat d’urgence. En effet, avec les changements climatiques, les migrations forcées, les inégalités croissantes, notre monde doit faire face à des défis majeurs et partout. Les enjeux liés à l’éducation et au partage des connaissance deviennent des priorités absolues pour construire des sociétés plus inclusives et résilientes. Mais il y a un gros problème : 50% de la population mondiale n’a pas accès à une connexion internet. Ce qui veut simplement dire qu’un être humain sur deux n’a pas la capacité de rechercher ou d’accéder à des informations en ligne.
L’ONG Bibliothèques Sans Frontières (BSF), représentée par Jeremy LACHAL, à l’origine de Kajou, travaille depuis 15 ans pour favoriser l’accès au savoir des populations vulnérables, des camps de réfugiés aux communautés rurales et urbaines isolées. C’est aussi pour ça qu’on est là, Kajou, une entreprise sociale dédiée à la diffusion de contenus éducatifs et informatifs directement dans le téléphone des populations peu ou pas connectées à internet, grâce à une carte SD. Cette carte transforme un smartphone en une bibliothèque offline. Elle s’insère dans le port SD du téléphone Android et donne accès à des milliers de contenus préchargés, sans avoir recours à internet. Nous sommes aussi accessibles depuis les IPhone depuis le début de cette année, ça nous a valut 6 mois de travail pour y arriver. Pour ceux qui ont accès à internet, il existe Kajou Store où vous pouvez trouver du contenu sûr depuis le monde entier.
Une vision plus juste contre les inégalités
Chez Kajou, nous sommes des activistes de la connaissance. Nous sommes convaincus que l’accès à des contenue informationnels, éducatifs et de loisir de qualité est un prérequis pour renforcer l’autonomie des populations et construire des sociétés moins inégalitaires, plus juste et inclusives, partout dans le monde.
Nous avons un comité de parrainage et nous recevons le soutien de personnalités reconnues dans leur domaine. Au Sénégal, le comité est composé de :
- Idrissa Diabira (Directeur Général de l’ADEPME),
- Seynabou Thiam Monnier (Fondatrice Smart Ecosystem for Women),
- Ibrahim Nourr Eddine Diagne (Président du Conseil Numérique National),
- Sophie Nzinga SY (Styliste, créatice de mode),
- Pr. Magueye Gueye (Directeur du Campus Franco Sénégalais),
- Nabou Fall (Fondatrice de Nabou Fall Akademy et CEO de Vizeo),
- Ndongo Camara (Managing Partner de Nkak Audit),
- Dr. Massamba Gueye (Ecrivain, chercher, poète),
- Alassane Lo (Président du Réseau pour la promotion de l’entreprenariat en Afrique).
Les chiffres clés de Kajou et de leur impact social
Nous sommes 14 personnes dont 3 en France (moi y compris). Toutes les autres personnes se trouvent au Sénégal et nous avons 5 développeurs, 3 commerciaux, 1-2 personnes qui s’occupent du contenu, 1 directrice et une personne en charge de l’administratif.
Quant aux chiffres clés de notre impact social c’est :
- 77 256 bénéficiaires de Kajou depuis 2020 +83% par rapport à 2021
- 22 260 cartes Kajou en circulation +150% par rapport à 2021 (20 060 cartes SD et 2 600 e-cards)
- 92% des Kajoueurs réussissent mieux à l’école ou à l’université
- 97% des Kajoueurs estiment que Kajou a un impact positif sur leur santé et celle de leurs proches
- 96% des Kajoueurs voient leur niveau de vie s’améliorer grâce à Kajou
- 72% des Kajoueurs sont en Afrique subsaharienne
L’analyse de l’impact social est au cœur de la démarche de Kajou et a une double vocation formative et informative. Cet impact est analysé autour de trois grandes verticales : éducation, santé et emploi/revenus. Ces verticales participent aux Objectifs de Développement Durable des Nations Unies 3. 4 .8 et 10.
Le positionnement de Kajou n’est pas exactement celui d’une edtech mais plutôt d’un média qui donne accès à du contenu à haute valeur ajoutée et facilement mobilisable aux populations cibles. Cette approche repose sur le principe du microelearning : des ressources d’auto-formation courtes, très repratiques et consultables facilement en mobilité (dans les temps d’attente ou dans les transports par exemple). Pas besoin de diplômes ou d’expérience académique pour consulter Kajou : les contenus sont sélectionnés pour répondre aux besoins du plus grand nombre.
Nous n’avons donc pas de concurrence. De plus c’est un produit qui est très local de part la production de contenus, l’interactivité offline, la connectivité augmentée mais aussi la langue. En effet, c’est en français ou en anglais en fonction de la langue du téléphone mais on a aussi développé le produit avec 36 langues dont le Wolof et le Kirundi.
Une année 2023 riche en projets !
On fait un gros focus sur l’Afrique de l’Ouest. Nous voulons allez plus loin que le Sénégal, notamment en côte d’Ivoire. On a fait une levée de fonds de 1.3 millions d’euros l’année dernière parce que nous souhaitons donner à 10 millions de personnes en Afrique de l’Ouest, peu ou mal connectées à Internet, les moyens de s’informer, de s’éduquer et de développer leur activité professionnelles grâce à des contenus sur-mesure à fort impact social. Il est aussi question d’agrandir le store, avancer sur les autres projets du Bangladesh pour également pouvoir donner accès à l’éducation et aux connaissances et pourquoi pas aller au Moyen-Orient.
Nous avons un studio de production à Dakar en cours, pour 2023 nous aimerions le terminer.
Si je devais parler d’un challenge personnel, j’aimerai mettre en place une bande passante pour pouvoir mettre en place des partenariats.
Que vous évoque « Possible.Africa » ?
L’univers du possible ! Je trouve qu’il existe énormément d’aprioris sur l’Afrique, c’est un continent très mal connu. Il y a un grand vivier d’entrepreneurs et un écosystème incroyable. Il faut donc élargir l’univers des possibles !
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